"Dans ce lac-là; il n'y a rien à voir ! On s'est amusé à attraper
des barbottes ! Cela a passé le temps !"
Vous avez déjà entendu ce commentaire ? Certainement et votre répartie
aura sans doute été du type: "Bah ! On se trompe parfois ! Combien de
barbues avez-vous capturées ?" A deux reprises, votre
"poisson-chat" (savamment traduit par ictalurus - Ictaluridae)
s'impose comme sujet. de conversation. Dans les deux cas, il semble que ce
vulgaire fretin ait bien amusé nos deux plongeurs. Et pourtant ! Qu'en
connaissent-ils ?
1 - LES ESPÈCES
La "Nébulosus" (brune) est la plus commune des
barbottes. Sa queue, coupée carrée, et ses moustaches noires la distinguent de
cette famille. La "jaune" (Natalis) a une queue arrondie
et de la barbe blanche, la "barbue" (Punctatus) possède
un appendice caudal fourchu et est généralement plus grosse.
2 - SES HABITUDES
En plongée de nuit, vous pourrez l'observer plus à loisir dans les cours
d'eau de la région de Montréal. C'est à ce moment qu'elle est plus active.
Elle se gave de larves, de sangsues, de vers, d'écrevisses et de ménés. Une
vraie goinfre qui pourtant n'engraisse que peu (poids moyen 0,5 kg pour une
longueur moyenne de 25 à 35 cm).
Elle vit à faible profondeur. Les 10 à 13 mètres sont sa limite de
plongée. Elle résiste à tout ou presque... On en a vu survivre à L'asphyxie
par moins de 0,02 ppm d'oxygène !
La barbotte brune se reproduit à la fin mai, début juin, en eau peu
profonde, à l'abri d'arbres morts, de quais ou même d'un vieux pneu.
Chez les brunes, on fraye le jour, après s'être caressé les barbiches,
chacun regardant dans une direction opposée, de 2 000 à 13 000 oeufs qui
parfois seront dévorés sur le champ par un papa gourmand... Mais une fois
l'instinct maternel (ou paternel) bien installé, les barbottes s'occuperont de
leurs rejetons. Après l'éclosion, on garde les barbottines en troupeau
concentrique de plusieurs centaines d'individus, puis on les promène le long du
rivage en un long ruban noir, une "sombre" procession.
Sans doute protège-t-on les "tout-petits" des prédateurs. Plus
tard, lorsqu'elles auront atteint une certaine maturité, les barbottes seront
bien défendues. Elles sont alors un mets très piquant pour qui ose essayer de
les happer. Les premiers rayons des nageoires dorsales et pectorales sont osseux
et peuvent se bloquer en position "je te pique" grâce à un
ingénieux dispositif articulatoire. Et croyez-en mon expérience de pêcheur et
"touche-à-tout", elles sortent leurs armes à la moindre alerte. Les
biologistes signalent la capture de maskinongés, dorés et brochets qui avaient
de tels dards bien plantés dans la chair, traces de repas trop gargantuesques
sans doute.
3 - SES ATTRAITS
Certainement pas le plus beau des poissons mais peut-être un des plus
succulents, surtout quand pêché en eau froide. Ce délicieux Ictaluridé
fera le bonheur de qui sait l'apprêter. Il occupera les temps morts de vos
plongées et désennuiera vos jeunes, fervents de pêche ou d'apnée.
J'ai eu la surprise de le voir un jour en aquarium chez un copain! Il devient
alors un sujet de conversation qui n'a rien de "vaseux".
Bonne GIBELOTTE,
La Rédaction.