On dit que la mode a tendance à changer chez certains gastéropodes. La
coquille protectrice aurait été mise de côté pour faire place à une robe de
dentelle tout à fait splendide.
À ses débuts, le manteau du gastéropode essayait de recouvrir cette
carapace pour tenter de la dissimuler et l'animal pouvait toujours se réfugier
à l'intérieur de celle-ci (Lunatia eros). Puis cette coquille a été
complètement enveloppée sous le manteau pour ne laisser qu'un vestige de masse
dure sous la peau (Aplysia willcoxe). Quant au nudibranche, il s'en est
complètement débarrassé et a fait peau neuve pour éviter d'avoir l'air d'un
vulgaire ver rampant.
Le nudibranche ressemble à une limace dont le dos serait recouvert de
tubercules ou d'excroissances qui formeraient un manteau de poils épais. Le
nudibranche aux branchies rouges (Coryphella sp.) possède 100
excroissances de chaque côté de son dos sur un corps de 30 mm et le
nudibranche à crinière (Aeolidia papillosa), en possède 400 sur un
corps de 100 mm. Ces excroissances sont en fait des branchies externes appelées
"cerata". La tète est bien développée et est surmontée de deux
paires de tentacules. La première, frontale, est appelée tentacule orale et
celles de derrière les rhinophores. Les nudibranches de nos eaux sont
carnivores et chacune des deux espèces tend à se spécialiser à se nourrir
sur des proies précises. L'un choisira les éponges, les tuniciers ou les
bryozoaires, tandis que l'autre optera pour les anémones et les hydroïdes.
Dans le cas où il y aurait ingestion d'anémones, le poison contenu dans les
tentacules de celles-ci s'accumulera à l'extrémité des ceratas du nudibranche
le rendant par conséquent un mets dédaigné des prédateurs.
Les nudibranches sont très fragiles. il faut les manipuler avec soin. On les
retrouve partout, mais vu leur petitesse et leur colon, un peu adapté au milieu
il est difficile de les distinguer sur le fond. Il faut chercher minutieusement
sur une paroi de roche en regardant centimètre par centimètre. Dans les
algues, ils rampent sur les tiges; sur un fond de sable, n'y pensez pas: ils ne
peuvent s'y fixer.
Si vous faites un séjour à Percé, une plongée à l'île Bonaventure vous
permettra sûrement de pouvoir admirer cette Dame limace dans tous ses atouts.
En effet, on ne peut que lui donner un attribut féminin, puisque les ceratas
aux couleurs pâles de rose, rouge ou mauve sur un fond beige, donnent
l'impression qu'elle porte une chevelure aux coloris "Punk" se mouvant
avec grâce dans le vent (eau).
Mes rencontres les plus fréquentes avec cette beauté se situaient tard au
printemps, ou tôt à l'automne jusqu'à tout récemment où je l'ai découverte
en plongée sous-glace, rampant sur les longues zostères. J'ai même pensé que
c'était à ce temps de l'année (janvier) qu'elles se reproduisaient puisque
j'ai vu à plusieurs endroits dans le même secteur des amas blanchâtres
ressemblant à des oeufs qui avaient l'apparence des nouilles en ressorts de nos
soupes. Une forme aussi finement découpée ne pouvait qu'appartenir à cette
Dame, mais je n'ai pu trouver personne pour le confirmer.
On en connaît si peu sur cette espèce que je ne peux étirer mon texte plus
longtemps... Mais je pense que si un(e) spécialiste des invertébrés
concentrait ses études sur cette beauté de la nature il/elle ne serait pas
déçu(e).