"Coloration: dessus allant
du vert olive au brun foncé, flancs plus pâles tournant au blanc argenté
dessous. Lignes ondulantes vert pâle ou crème sur le dessus de la tête et le
dos. En plus de ces taches pâles sur les flancs, il y a de petites taches
rouges distinctes entourées d'un halo bleuâtre. Anale, pelviennes et
pectorales à bord blanc immaculé ordinairement suivi de pigments noirs ou
rougeâtres".
Une telle palette de couleurs ne se retrouve que dans les mers du Sud, me
direz-vous, mais détrompez-vous. Ce poisson est bel et bien de chez nous. Il
est mieux connu sous les noms de truite mouchetée, truite de ruisseau ou même
truite de mer. Il m'est apparu dans toute sa splendeur, lors d'une plongée dans
un étang à truite dont le propriétaire était très fier. Eh oui, j'ai
triché ! Ce n'est pas à tous les plongeurs qu'un telle opportunité se
présente: moi. j'ai sauté dessus ou plutôt plongé dedans.. .Étant donné
qu'il est très difficile de photographier des truites à l'état sauvage. il a
bien fallu que je prenne les moyens pour pouvoir vous décrire un peu plus en
détail ce magnifique salmonidé.
Dans tous les livres de références, il est dit qu'elle est très répandue
dans les cours d'eau et les lacs où l'eau est fraîche, claire et bien
oxygénée. Elle déteste les eaux à température au dessus de 20° C (68° F).
Dès que ça devient trop chaud, elle va se rafraîchir dans les profondeur. Si
elle est si commune pourquoi ne la rencontrons-nous pas plus couramment en
plongée? Une truite de 2 ou 3 kilos, ça fait parler autant un plongeur qu'un
pêcheur et doublement plus si le plongeur est un pécheur. La réponse est que
l'Omble de Fontaine comme presque tous ses cousins est très fugace et craintif.
La moindre vibration le fait fuir. Croyez-moi j'ai essayé d'en approcher un
spécimen dans un étang où il y en avait une centaine, et il m'a fallu jouer
d'astuces. Dès que je donnais un coup de palmes. les truites disparaissaient.
Alors ne vous demandez plus pourquoi le plongeur de lac ne la rencontre guère
sur son parcours. Il vous faudra modifier vos habitudes, vous équiper de votre
attirail d'apnée pour eau froide, vous mettre à la recherche d'un ruisseau peu
profond ou les berges leur permettent de se mettre à l'abri. où un courant
faible à moyen leur apporte leur dîner sur un plateau. Même si l'Omble de
Fontaine est un poisson très rapide. il préfère que son repas lui soit livré
à domicile plutôt que d'aller le chercher là où il se trouve. Dans le cas
où il faudra que la truite se mette en quête de nourriture, elle s'accommodera
de tout ce qui bouge et qui n'est pas trop gros pour être avalé d'un seul
morceau: vers, crustacés, araignées, mollusques, poissons, "caviar",
grenouilles, couleuvres et parfois chez les grand spécimens, une envie
irrésistible de varier le menu avec de petits mammifères ! Des études ont
prouvé qu'elle peut avaler jusqu'à 50% de son poids en nourriture lorsque la
température de l'eau est à 13° C, mais dès que ça se rapproche de 9° C ou
de 17° C, leur consommation est beaucoup moindre.
J'ai pu observer une certaine hiérarchie chez ces poissons. Les plus forts
se nourrissent en premier dans les étangs artificiels et ce sont aussi les plus
gros qui ont les meilleurs abris sur les rives où sous les rochers. Par contre,
en milieu naturel les gros envoient les petits en éclaireurs lorsqu'on leur
présente un vers sur un hameçon.
Les Ombles de Fontaine sont très possessifs et ne laissent approcher aucun
de leur congénère sur leur territoire. Par contre, si le propriétaire des
lieux est délogé à cause de son appétit insatiable, entretenu par un
pêcheur persévérant, le deuxième dans la hiérarchie viendra prendre sa
place dans ce logement laissé vacant qu'il surveillera jalousement. Le seul
temps où les truites sont un plus sociables, c'est en saison de fraie. Le mâle
en livrée resplendissante tentera de séduire une femelle occupée à préparer
le berceau des nouveau-nés. Un coup de queue par ci, un coup de queue par là,
un petit frottement. quelques vibrations de tout le corps suffiront. Oeufs et
laitance se fusionneront pour donner des oeufs adhésifs qui colleront au
gravier du nid. Maman truite recouvrira sa portée d'une couche de pierraille et
voilà une nouvelle génération qui se prépare.
Après l'éclosion (50 à 100 jours selon la température) les jeunes vivront
sur leur réserve (sac vitellin). À l'âge d'environ 15 jours, ils pourront
nager librement. C'est à ce moment critique que les Becs-scie et les
Martins-pêcheurs décident de savourer du poisson frais mesurant alors 30 mm.
Si les jeunes truites gagnent la bataille contre leurs prédateurs, elles
peuvent espérer vivre jusqu'à 5 ans, ce qui est court comparé aux autres
truites.
Et voilà pour l'une de nos plus belles truites québécoises. On peut
retrouver cette même truite en mer, mais question de l'observer, je vous
souhaite bien de la chance. Commencez donc par un ruisseau ou au pied d'une
petite chute où l'eau est fraîche, vos recherches pourraient être beaucoup
plus fructueuses.
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